Évolution est une jeune entreprise qui offre aujourd’hui deux volets de services : l’accompagnement aux entreprises dans le secteur linguistique et la création de camps de jour éducatifs trilingues. Fondée sous la bannière privée, l’organisation s’est depuis développée à vitesse grand V après avoir effectué un virage vers le modèle de l’économie sociale.
Geneviève Lapointe Larouche et Stéphanie Labelle se sont rencontrées à l’université il y a une quinzaine d’années, alors qu’elles étudiaient toutes deux en enseignement des langues. Dix ans s’écouleront ensuite avant que leurs routes ne se recroisent. Fruit du destin : elles possèdent alors chacune leur école de langue, avec pour activités l’enseignement de l’anglais et de l’espagnol, en plus de la francisation. Partageant des valeurs de démocratie et souhaitant améliorer l’accès à l’apprentissage de langues secondes chez les jeunes, elles décident de lancer un projet pilote dans leur région natale. C’est ainsi qu’est né, en 2018, un premier camp de jour éducatif à Saint-Colomban. Se déroulant sous la forme d’un laboratoire pédagogique, l’expérience leur permet de tester le concept et de confirmer sa pertinence.
“ Et comme notre mode de gestion se voulait déjà horizontal et humain, la culture interne d’Évolution se rattachait beaucoup plus à celle de l’économie sociale. C’est un modèle plus enrichissant qui te permet de travailler avec des humains en étant au même niveau et de façon transparente. ”
Puis, c’est au tour de Mélissa St-Jean de croiser la route du duo. Avec un bagage de gestionnaire et tournée vers l’implication sociale, elle se joint naturellement à l’organisation où ensemble, elles définiront leur identité unique : des pédagogues entrepreneures.
Un modèle d’affaires plus adéquat
À l’été 2019 a lieu officiellement le premier camp de jour éducatif, en collaboration avec l’Académie Lafontaine, située à Saint-Jérôme. Durant neuf semaines, une moyenne de 62 enfants effectueront un tour du monde grâce à diverses activités ludiques et éducatives, permettant la pratique de l’anglais et de l’espagnol à raison de 15 heures respectivement par semaine, en plus du français.
Mais avec l’implantation des activités de l’entreprise, les entrepreneures constatent de plus en plus les avantages qu’amènerait un changement de leur modèle d’affaires. C’est ainsi qu’en août 2019 naît l’organisme à but non lucratif (OBNL) Évolution – Camp trilingue et innovation.
« En étant incorporée, une entreprise en éducation rencontre des barrières qui sont limitantes. Et comme notre mode de gestion se voulait déjà horizontal et humain, la culture interne d’Évolution se rattachait beaucoup plus à celle de l’économie sociale. C’est un modèle plus enrichissant qui te permet de travailler avec des humains en étant au même niveau et de façon transparente. Ça fait avancer les choses plus facilement. Une portion des revenus est réinvestie dans les projets de l’entreprise, ce qui favorise l’engagement et la rétention des employés. Ils choisissent de s’investir chez vous car ils sont impliqués dans l’évolution des projets », explique Geneviève Lapointe Larouche.
« Le côté humain est très important pour nous. On n’est pas by the book pour une école de langues. Et si l’entreprise existe, c’est parce que nous sommes trois partenaires complémentaires. C’est la force du collectif : ensemble, on va plus loin », ajoute Stéphanie Labelle.
L’organisme compte maintenant un conseil d’administration formé de trois personnes issues des secteurs de la gestion, du développement des affaires et de la diversité culturelle. Du côté de l’adhésion, Évolution ne compte pas de membres pour l’instant. L’équipe est cependant en réflexion quant au développement futur d’un département qui y serait relié.
Innover amène aussi des défis
À ce jour, il ne semble pas y avoir d’entreprise homonyme en sol québécois. Évolution a développé un programme éducatif enrichi unique, pour lequel les entrepreneures ont dû sensibiliser partenaires et clients.
« La volonté première, c’est celle d’améliorer la qualité de l’éducation. Mais il a fallu démontrer qu’il ne s’agissait pas d’un camp de jour habituel, que ça répond à un réel besoin en termes d’apprentissage. Avec la réalité d’aujourd’hui, il est important que les enfants développent leurs capacités linguistiques. Ce sont des outils pour leur avenir, pour leur permettre de réaliser leur plein potentiel. L’anglais est la langue des affaires et l’espagnol est parmi les langues les plus parlées dans le monde. Et puisque les camps se déroulent durant les vacances d’été, ils contribuent à freiner la perte des acquis scolaires qui peut se produire chez les élèves », poursuit Mme Labelle.
…et les défis poussent à innover
Alors que l’OBNL était formé depuis moins d’un an, une certaine pandémie a mis sur pause ses activités. Les écoles et services parascolaires étant fermés, le camp prévu durant la saison estivale 2020 ne pourrait pas avoir lieu. Solution? Se retrousser les manches!
« Ça a mis à terre tous nos services. Alors nous avons décidé de profiter de ce temps d’arrêt forcé pour nous former. Nous sommes allées chercher de l’accompagnement qui nous a permis de grandir de façon accélérée. Cette période nous a alors donné la possibilité de créer de nouveaux services et de développer ceux qu’on avait déjà. Et comme j’avais travaillé en francisation par le passé, environ 5% de nos services pré-pandémie étaient tournés vers ce domaine et destinés aux entreprises. Ces derniers ont donc pris davantage d’espace dans notre plan de développement », affirme Mme Lapointe Larouche.
Suite à cet exercice, une gamme de services en accompagnement linguistique a été mise sur pied pour former les entreprises de la région. En plus de l’enseignement des trois langues, Évolution offre également un accompagnement personnalisé en matière de diversité culturelle aux entreprises de divers secteurs.
« Même dans une manufacture, il y a un besoin de communication entre les équipes. Notre approche est très axée sur le terrain et tournée vers l’intégration de la diversité culturelle. On tient compte des besoins de base et de l’environnement du travailleur. Ça permet notamment aux nouveaux arrivants d’avoir des outils pour mieux s’intégrer dans leur vie au Québec », soutient Stéphanie Labelle.
Parallèlement, cette période a également été mise à profit afin d’aller à la rencontre de nouveaux partenaires en vue de la reprise des camps de jour éducatifs. En 2021, six points de services ont été développés à travers la province pour autant de camps réalisés, enregistrant au passage une hausse de la clientèle moyenne pour chacun d’eux, tandis que les prévisions sont optimistes pour 2022. Au total, plus d’une vingtaine de partenaires composent les écosystèmes locaux permettant la réalisation des activités.
Une croissance décomplexée
En ce qui a trait au financement, le modèle innovant de l’entreprise l’empêche fréquemment de cadrer dans les critères du soutien public.
« Même si nous bénéficions de certains appuis, nous avons choisis d’avoir une plus grande part de revenus autogénérés plutôt que d’attendre l’ouverture de programmes gouvernementaux compatibles. Cette réalité ne nous amène pas de dualité entre les portions économiques et sociales qui définissent notre entreprise, puisque nous prenons les moyens afin que l’une nourrisse l’autre. Ce sont nos services aux entreprises qui nous permettent de réaliser notre mission éducative auprès des jeunes. Et pour chaque heure de formation en entreprise, par employé, un dollar est versé dans un fonds qui permet à des enfants issus de familles défavorisées d’accéder aux camps. À l’heure actuelle, notre principal défi se situe plutôt au niveau de la gestion de la croissance. D’autres embauches s’en viennent. Maintenant que nous sommes reconnues, il faut livrer la marchandise! », conclut Geneviève Lapointe Larouche.
Évolution en chiffres
- Nombre d’employés, volet entreprises : 9 formatrices (francisation, anglais ou espagnol)
- Nombre d’employés, volet camps : jusqu’à 50 en période estivale et 3 à temps plein durant l’année
- Nombre d’entreprises desservies : 6 par année, comptant chacune de 1 à 105 employés
- Nombre d’enfants qui ont participé aux camps à ce jour : 2120
- Nombre de semaines de camps offertes à des enfants issus de familles défavorisées (pour 2021 et 2022) : 60
Bas de vignette photo : Dans l’ordre habituel, Stéphanie Labelle, Mélissa St-Jean et Geneviève Lapointe Larouche, cofondatrices de l’école de langues Évolution.
Pour en savoir plus : www.evolutionlangue.com.